(Mise en) Page de l'Histoire
Septième long-métrage de Norodom Sihanouk en moins de trois ans, il faut sérieusement croire, que les tensions politiques ne furent finalement pas si graves pour que le Souverain puisse s'adonner autant à sa passion…quoique, "Crépuscule" soit une légère tromperie sur la marchandise, le film reprenant des scènes entières de ses antérieurs "La forêt enchantée" (la danse des paysans – une récurrente dans la filmo de Norodom), "Cambodge 1965" (un pillage éhonté de scènes entières de ce documentaire, alourdies par un commentaire clairement propagandiste à la gloire du Cambodge des années 1960) et "Le petit prince du peuple" (la danse des "singes" dans els ruines du temple d'Angkor).
Autre surprise de taille: alors que Norodom avait justifié son activité cinématographique pour lancer une véritable industrie digne de ce nom, en tournant en couleur et en 35 mm (contre le 16 mm principalement utilisé par souci économique) et en voulant aller à l'encontre des légendes populaires et intrigues à l'eau de rose, il met en scène une bonne grosse comédie sentimentale au destin tragique pour faire pleurer dans les chaumières.
Faut croire que la rapidité d'exécution de ses films (ou sa haute position, défavorable à des critiques positives) ne lui ai pas donné l'occasion de remettre en question les défauts récurrents de tous ses films, le rythme étant encore incroyablement étiré en longueur avec des scènes totalement superflues (une démultiplication de scènes en voiture sans aucun intérêt ou des promenades en parc interminables). Une mention spéciale également au scénariste, lors de cette hilarante scène d'introduction, où le prince lit une lettre, qui le prévient de l'arrivée imminente de la Maharani – soit dès le lendemain de l'envoi de la lettre! Et on salue la rapidité de distribution du courrier cambodgien de l'époque!
Si le Prince met toujours autant de soin à glorifier la beauté de son pays, il ne cache plus guère ses intentions propagandistes: la reprise de scènes entières de son documentaire "Cambodge 1965" s'accompagne de commentaires très, très lourds de sens et que dire de cette "leçon d'Histoire" prodiguée par le souverain (en un impeccable français, of course!).
Il faut savoir, que les relations entre l'Inde et le Cambodge étaient légèrement tendues à l'époque; pire, les autorités hindoues avaient osé ouvertement critiquer les précédents films du Prince, l'accusant de glorifier des monuments nationaux clairement inspirés du style indien. Bon diplomate, Norodom imagine donc cette histoire d'Amour impossible entre un Prince cambodgien et une Maharani (interprétée par sa femme à al vraie vie, Monique, au jeu toujours aussi "retenu"). Leur rapprochement vaut quand même la mort d'une dévouée khmère, mais n'y voyant aucun sous-entendu autre que dramaturgique…Bref, sous prétexte de s'inspirer d'un livre de son "ami archéologue Bernard Groslier", il cite des passages entiers (si ce n'est la quasi-intégralité du bouquin, vu la longueur de la scène) de l'ouvrage, consacré aux monuments d'Angkor. Le texte met en évidence, que même si certaines influences indiennes sont très certainement présentes dans cet Art, il en faut pas oublier, que la culture khmère était déjà présente bien en amont – comme l'aura reconnu la présence française par la suite…Et paf! dans les dents, l'Inde!! Et à Norodom d'embrayer sur une leçon d'Histoire quelque peu embarrassante, célébrant le génie unique du Cambodge…L'intrigue enchaîne donc tout naturellement par les images pompeuses précédemment citées du documentaire, justifiée par une sortie de la Maharani le jour de la "fête nationale de l'indépendance du Cambodge".
Autant dans les précédents longs-métrages, on pouvait passer par-dessus les influences nationalistes, autant ce long-métrage n'est que pure propagande paresseusement mise en scène. L'intrigue – une fois n'est pas coutume – n'est pas à évoquer outre mesure en raison de l'extrême faiblesse du scénario.