Feux de croisement
J'engageais la galette en mode complétiste et je me suis retrouvé, surpris et penaud, devant une chouette suite. J'ai trop longtemps négligé l'apport de Wing-Cheong Law - même son existence en fait - réalisateur de seconde équipe chez Johnnie To. Il connaît manifestement tous les "codes" du maître. Voilà typiquement l'un de ces nombreux talents cachés dans l'ombre des ceuces qui prennent la lumière.
On a un petit scénario simple, mais efficace, se déroulant cette fois de jour, avec comme un léger filtre jaune pour figurer le climat sub-tropical et le sang qui monte à la tête. C'est très bien filmé, clairement dans la veine de PTU, avec cette fois une rigueur "carrée" aussi propre qu'un uniforme sortant du dressing. Ca m'a rappelé L'année du chat de l'Allemand Dominik Graf. Je n'ai pensé téléfilm que sur quelques plans, allez, pour le reste c'est du ciné pour ma part et le casting est impeccable. J'ai pris mon pied à revoir les persos et à assister à ce bal de flics qui se croisent et s'entrecroisent, en plus de profiter, tout simplement, d'un bon polar.
Le climax n'est pas tant une scène d'action qu'une comédie musicale où nos bonsommes bleus se déploient avec une excellente chorégraphie, lentement, mais précautionneusement, au son de rifs de guitare bienvenus. Jubilatoire. D'ailleurs tous les plans de groupe sont travaillés. Celui qui va jusqu'à planter un flic derrière une vitre de bagnole pour cadrer toute l'équipe, j'ai adoré. Les emplacement de chacun sont pensés au poil de cul de sergent, tout particulièrement l'unité stoïque, observatrice, dirigée par le perso de Maggie Siu. Elle reste le regard moral, pivot, qui observe l'unité de Simon Yam, davantage en mouvement et longeant parfois la ligne du mauvais côté. Ce rôle de femme qui sermonne (du regard), mais garde une certaine complicité, a du sens. On voit une logique de couple sans que c'en soit un.
Les échos d'avec le film inaugural sont donc là : on retrouve une progression posée dans un escalier - avec une loooongue attente osée sur un palier - le perso de Lam Suet reperd son flingue à un moment donné, et pour une autre raison les boeufs carottes entrent dans la danse. Brillant, car si ailleurs on penserait simple redite, ici ça ajoute un côté routinier à leur quotidien ; ça paye. Un évènement surgit et un flic réagit de telle façon. Tu découvres ça dans un film, ok, mais si le lendeman il se passe la même chose et que le flic recommence : paf, tu ressens l'usure, l'adaptation. L'expérience du flic joué par Simon Yam y gagne clairement. Le film, très malin, s'amuse même à la fin en enchaînant des plans identiques sur un même décor en faisant d'abord passer un truand, puis un flic sur la corde raide, tous deux se comportant de manière identique, pour mieux jouer sur la perte de repères. Décor que j'ai vu récemment dans l'hilarant
Out of the Dark de Stephen Chow, ce qui ajoute au ludique-méta-nostalgique de l'ensemble.
Un léger bémol : la violence épisodique du héros envers les délinquants obtiendrait presque cette fois une tolérance goguenarde, fin à l'appui. Mais le twist terminal est si gonflé qu'il finit d'emporter le morceau. Ce Tactical Unit : The Code est très recommandable.
Une suite qui ressemble certes à un téléfilm, mais agréable à suivre et certifiée Milkyway. Je prend !
Bon, il faut le dire, ce projet ne me faisait pas trop palpiter. Oui,
Tactical Unit : The Code est donc une sorte de direct to video. Mais dès le premier plan, j'ai senti que j'allais passer un bon moment. Le premier plan c'est tout simplement une scène de passage à tabac d'un mec par la PTU dans une ruelle filmée par une caméra de surveillance. Ca commence bien. L'affaire est rapidement récupérée par la CAPO, la police des police HK. Évidemment, l'équipe qui est censée surveiller ce secteur est celle de Simon Yam, et c'est un de leur collègue qui va trinquer, et devoir rendre les armes. Mais ce n'est que le pitch de départ !
C'est un réel plaisir de retrouver l'équipe du film de Johnnie To, Simon Yam, Maggie Siu et Lam Suet en tête. On reconnais tout de suite bien leur caractère. Le film se suit avec pas mal de plaisir d'autant que le rythme lent réussi à maintenir la tension du début à la fin (je n'ai vraiment pas vu le temps passer !). Petit budget, la réalisation de Wing Cheong fait dans le minimalisme urbain, on est loin du style visuel de Johnnie To mais c'est "impeccable" (y a même quelques beaux cadrages) et la bande son, sans être prodigieuse est efficace. Cela dit il ne faudra pas s'attendre à de l'action pure car y en a quasiment pas, mais y a une sorte de long remix de la scène des escaliers de
PTU. A sa vision le film ne m'a pas semblé tendre avec "l'administration" HK, s'inscrivant dans la continuité de
PTU.
En tout cas, la Milkyway démontre une nouvelle fois son savoir-faire dans le domaine du polar avec ce produit tout à fait regardable (qui vaut largement bien des bouses qui sortes au ciné à HK tous les ans) qui porte bien la marque de fabrique de la maison et présente une bonne mise en bouche à
Comrades in Arms dont on attend tout de même un peu plus avec sa sortie au cinéma.
Loin d'être déshonorant
"Tactical Unit - The Code" a beau être qu'un téléfilm, il n'en demeure pas moins de qualité.
Il est servi par une mise en scène (cadrages et mouvement de caméra) arrivant à insuffler un dynamisme assez agréable tout en restant dans le sillage du premier opus (PTU destiné aux salles de cinéma).
Le script propose de se plonger dans le fonctionnement de la PTU surtout à travers un personnage aux prises avec sa hiérarchie et ses propres soucis personnels.
Dans l'ensemble l'histoire semble assez crédible pour accrocher jusqu'au bout en évitant de gommer, au même titre que le film inaugural, les techniques d'interrogatoire peu orthodoxe de Police Tactical Unit.
Hormis la réalisation moins ample que son prédécesseur, "The Code" tranche également par un tournage en bonne partie de jour et un dernier tiers plus nerveux en matière d'action et de tension.Ce métrage fait partie du coffret blu ray intégrale PTU édité chez Spectrum Films.
Le transfert hd propose un résultat fort convaincant et un bonus au contenu informatif non négligeable.
02 février 2022
par
A-b-a