La meilleure adaptation de Superman
Ce film m'a beaucoup touché, car il comporte tout ce qu'un film d'auteur accessible a besoin pour être un excellent film. Tout d'abord, l'histoire s'attaque à l'individualisme propre au capitalisme, mais encore plus présent dans la société coréenne, dans laquelle on ne se préoccupe des problèmes que s'ils touchent à notre famille. Mais ça va ici encore plus loin, puisqu'il interroge directement le rôle des médias, et le non-interventionnisme dont on accuse souvent les journalistes, et d'autant plus les reporters photographes ou vidéastes qui se protègent des événements derrière leur objectif.
L'image qui me vient en tête est cette photo d'un enfant africain qui est guetté par un oiseau rapace, et qui a valu au phototaphe d'être longtemps critiqué. Ici, cette idée revient avec la journaliste disant vouloir partir filmer les lions en Afrique. Au lieu d'un animal sauvage dans la savane, c'est un samaritain dérangé perdu dans la ville qu'elle va rencontrer, et filmer comme un documentaire animalier. Avant d'intervenir directement dans le sort de ce personnage, quitte à le trahir et le rendre malheureux. On sent tout le poids de cette décision lors d'une séquence slow-motion accompagnée d'une voix-off qui fait s'auto-référence en rappelant ce procédé typique d'une reportage émouvant.
Ce Superman-ci ne sauve pas la planète de redoutables envahisseurs, ou ne contrecarre pas les plans de Lex Luthor. Il est beaucoup plus humble que ça. La planète, il veut la sauver des hommes eux-mêmes, qui la polluent sans cesse. Dans la ville, il s'attaque aussi bien aux voleurs de sacs à main qu'aux exhibitionnistes, aide les personnes âgées à traverser la rue, joue avec les enfants.
Le réalisateur s'est beaucoup amusé à reprendre les codes de Superman, tout d'abord dans une séquence parodiant directement la série, puis en montrant sa propre version des super-pouvoirs, comme le "vol" sur une foule d'écologiste, symbolique comme il se doit, ou des éléments presque mythologiques du personnage, comme la planète d'origine Krypton, ou encore un bout de kryptonite dans son cerveau qui le prive de ses pouvoirs. Lorsqu'on réalise que tous ces éléments sont intimement liés à des faits réels, et surtout historiques, l'histoire prend encore un nouvel angle d'interprétation, venue d'un temps où le monde était différent, lorsque les héros pouvaient rêver avoir des pouvoirs.
Tout ce scénario méritait d'être mené par de bons acteurs, et c'est effectivement le cas. Jun Ji-hyeon qui m'avait passablement déçu dans ses derniers rôles est revenue en force dans mon estime grâce à son interprétation exceptionnelle, bien plus variée que dans My Sassy Girl, et prouve une fois pour toute qu'elle est une grande actrice bien trop rare. On s'attache automatiquement à son personnage désabusé, tellement obsédé par ses reportage qu'il a même une voix-off dans sa tête qui commente sa vie. Hwang Jeong-min n'est pas en reste, et beaucoup se souviendront de sa petite danse joyeuse. La transformation du personnage est d'autant plus radicale dans la deuxième partie du film, lorsque ses souvenirs refont surface, et on prend vraiment pitié pour lui.
A noter également la musique qui m'a marqué pour son originalité. Pas de grandes envolées d'une armée de violons, mais plutôt des mélodies simples au piano, ni tristes ni joyeuses, parfois rythmées, qui participent à l'étrangeté de cette histoire. Plus loin, on peut constater avec stupeur l'utilisation très audacieuse de cornemuse, le dernier instrument qu'on aurait pu imaginer pour un tel film, mais qui accompagne merveilleusement les dernières scènes importantes du film.
La réalisation reste classique, se mettant complètement au service de la narration, avec quelques rares flash-backs. Cela reste quand même un drame, avec sa petite période un peu molle quand on s'approche de la fin. Mais cette dernière est diaboliquement efficace sans être lourde, puisque, je l'avoue, pour une des rares fois, un film coréen m'aura fait verser une larme, une larme de joie mélancolique. Ce film est tellement bourré de bonnes idées, accompagnées par une ambiance à la fois loufoque et réaliste, qu'il représente pour moi un véritable coup de coeur.
Sujet fort, interprétation superbe
C'est le fim qu'il fallait à Jeon Ji-Hyun pour prouver qu'elle n'était pas juste une Sassy Girl qui passe le plus clair de son temps à faire des publicités pour Samsung. Elle casse ici son image en interprétant une réalisatrice de documentaire télévisé au langage un peu rude qui veut démissionner. Elle rencontre alors un homme qui se prend pour Superman, et décide de réaliser un film à son sujet. Mais au fur et à mesure qu'elle suit le personnage, elle s'implique dans son histoire et plonge au plus profond de sa vie et de ses souvenirs. Le réalisateur en a gros et il le montre. Malaton était déjà très fort en matière de crtique sociale, A Man Once a Superman va plus loin en s'attaquant à un fondement du capitalisme : l'individualisme, qui s'est installé dans le moindre recoin de la société coréenne. Le message est limpide, rien n'est à jeter, et les deux interprètes donnent de leur personne pour retranscrire toutes les émotions sur l'écran. La réalisation s'autorise également des idées originales sur les plans, les angles et les outils de narration, comme cette voix off qui censée correspondre aux pensées de la journaliste qui est complètement obnubilée par les voix off de documentaire qui lui tapent sur le système. On regrettera néanmoins une baisse de régime sur la fin, mais la chute n'en est pas gâchée pour autant. Finalement un excellent film qui ne parle pas dans le vent et interprétation impeccable d'un duo de vrais acteurs.
08 décembre 2008
par
Elise
Plus fort que la mort
Un film tendre et fort. Entre folie douce et dure réalité, génie loufoque et simplicité renversante, un hymne au bien sur pellicule.
Pouf pouf...
Synopsis allechant, casting correct, jeune realisateur talentueux, bonne critique... sauf que personnellement je suis passe a cote. Je n'ai pas accroche ni au cote utopique, ni au cote tragi-comique. Passe la premiere demie heure interessante, car developpant l'idee originale du scenario, le film commence a tourner en rond severement, et on sent bien que l'histoire ne peut alors se terminer qu'en sucette, avec une morale a 100 won enoncee tout en "finesse" en guise de conclusion.
Rêve d'un jour
Second film à sortir dans un relatif anonymat suite à l'exceptionnel succès de son premier "Marathon," "The man who was superman" est sans aucun doute le projet le plus personnel du réalisateur Chung Yoon-chul à ce jour.
Il faut passer une première heure un peu gnangnan pour arriver au cœur même de son œuvre. Le ton comique vire au mélodrame pur jus pour se terminer dans un dénouement assez surprenant; mais surtout, l'intrigue prend une connotation politique assez surprenante.
Faisant clairement référence au soulèvement populaire de Kwangjon, Chung Yoon-chul critique la fin des rêves de toute une génération de jeunes, qui ne s'étaient pas forcément pris pour des Supermen, mais qui avaient pensé pouvoir changer la société, comme le fait l'héros de l'histoire. La répression sanglante de cette nuit a mis fin à ce formidable élan du cœur…et par la même aux rêves de la plupart des manifestants.
Heureusement, que ce tragique événement politique n'aura pas mis fin à la prolifique créativité de son réalisateur, qui continue à signer des films tout à fait charmants et bien plus intéressants, que la production coréenne moyenne à sortir de nos jours. Pas sûr en revanche, que les producteurs lui confient de sitôt un autre budget aussi conséquent que celui de "The man…". Ce film n'est définitivement pas une œuvre commerciale à mettre entre toutes les mains.