un divertissement correct
Pas grand chose à dire sur ce qui est un Chu Yuan mineur. Le film ressemble en effet plus à une succession d'épisodes de série télévisée qu'à une comédie vraiment écrite. Ici, il s'agit surtout de se régaler de tous les petits caméos des stars d'époque de la Shaw Brothers et de se laisser divertir pas génialement mais correctement. Une fois ceci admis, le film bénéficie du savoir faire d'époque de la Shaw Brothers: le rythme est assez lent mais suffisant pour ne pas s'ennuyer, quelques situations sont assez bien trouvées (la querelle de voisinage du début, la fausse alerte incendie, le final), le comique est bien souligné par l'usage du zoom et de l'arret sur image, la photographie est superbe et on se laisse porter par cette visite guidée de toutes les classes sociales hongkongaises (le film répondait au désir de la population de voir un cinéma divertissant et plus proche de leur quotidien en période de crise économique ce qui explique son gros succès au Box Office). Au final, on est loin d'un Chow Sing Chi en grande forme mais cela reste plaisant: s'il n'est pas film à tirer vers le haut le niveau moyen de la production hongkongaise, il le maintient à un niveau ma fois correct. Un film caractéristique des périodes d'age d'or, donc?
Un grand classique du cinéma HK
Deuxième adaptation d'une pièce de théâtre chinoise à grand succès des années '60s, "House of 72 Tenants" est d'une double importance dans l'Histoire du ciné HK :
- il a re-lancé (puis imposé) les films tournés en cantonais. Langue tombée en désuétude à l'écran (en 1973, plus aucun film n'a été tourné en cantonais), le film a brillamment démontré qu'il y avait un fort potentiel public de langue cantonaise.
- première tentative de la Shaw de mélanger étroitement télé et cinéma.
"House..." était donc la simple adaptation d'une pièce de théâtre à succès, réalisée avec peu de moyens en 40 jours (dont 21 de tournage) et mettant en scène la plupart des vedettes télé de l'époque. La télévision prenant une importance de plus en plus grande au sein de la population HK, depuis qu'elle était accessible à la plupart des habitants dès la fin des années '60s, la Shaw Bros pensait logique d'obtenir un succès en mettant en scène des vedettes de la TV HK. Cette adaptation consistait donc un pari financier peu osé, mais ô combien probant : le film se classa le plus grand succès de l'année 1974, battant même les records d'affluence du film de Bruce Lee "Enter the Dragon" et étant au final une énorme entreprise rentable. Par la suite, la Shaw recourait souvent encore à monter un nouveau projet sur le seul nom d'une vedette de la télé; parallèlement, le monde de la TV et du cinéma se rapprochaient de plus en plus : Michael Hui, star de la télé prenait d'assaut le grand écran; les drames policiers ultra-réalistes du petit écran s'exportaient au grand écran et donnèrent naissance à ce qu'on a appellé à la fin des années '70s à la "Nouvelle Vague" (avec -en tête des réalisateurs phares - Ann Hui et Tsui Hark).
A voir aujourd'hui le film en lui-même, l'on peut se demander le grand succès de ce film. Suite de sketchs inégaux à la réalisation statique, seule la grossière carricature de thèmes HK d'actualité à l'époque de la sortie du film pourraient l'expliquer. Epinglant les propriétaires abusifs, la police corrompue, l'inflation monétaire, la hausse de la criminalité, etc, ce sont tous les sujets d'actualité de la société HK des années '70s qui sont concentrés sur un microcosme semblant tout droit sorti de la grande époque italienne des "Sales, Affreux et Méchants". En même temps, chaque saynète se termine positivement et dans la bonne humeur, les gens s'entraidant et les méchants propriétaires et les flics corrompus étant systématiquement punis.
Bref, c'est gentillet, divertissant et interprêté avec beaucoup de passion par une pléiade de jeunes acteurs aujourd'hui célèbres...
A voir pour le seul intérêt historique de l'oeuvre, mais aucunement pour s'attendre à un grand film, ni à un autre chef-d'oeuvre de Choh Yuan, dont la réalisation assure un minimum syndical et n'est aucunement représentatif de son travail en général.