drélium | 4 | Inclassable. |
Ordell Robbie | 3 | Visuellement audacieux, singulier mais mal joué et mis en musique. |
Xavier Chanoine | 3.5 | Bouscule les codes du film d'épouvante |
Car déjà un traitement graphique diamétralement opposé s'installe. Obayashi a comme une envie de dynamiter le moindre plan par des procédés clipesques qui sembleraient tape à l'oeil s'ils n'étaient pas aussi nombreux, parfaitement adéquats et diablement singuliers. L'écran se splittent, des inserts sautent au nez, petits dessins, décor d'appartement surchargé, matpainting buccoliques, montage étrangement disparate, tout est déjà embrumé, mélangé à l'extrême pour emmener le spectateur dans un livre de conte kinétique aussi poêtique que surréaliste.
Tout cela semble définitivement culcul de prime abord mais c'est sans compter sur la suite et l'arrivée de nos jeunes copines dans cette étrange maison de la grande tante qui se révèle une parfaite sorcière mangeuse d'âme. House accélère dès lors son lot de bizarreries pour un crescendo qui n'arrêtera qu'au générique final. Minuscule exemple révélateur, le film fait mine de se terminer sur la "princesse" et son prince qui l'emmène sur un fier destrier avec un générique dédié, et repart de plus belle pour une éruption volcanique de pitreries horrifiques, expression qui convient parfaitement à House.
La maison s'anime peu à peu, truffée d'objets qui semblent prendre vie, les filles disparaissent une à une dans des situations improbables et reviennent un peu plus tard pour une sensation de perplexité optimale. Bien difficile de décrire alors tout ce qui se passe dans ce rush débridé où le film innocent côtoie toujours l'horreur à l'italienne et le fantastique le plus saugrenu. Un piano mange la musicienne qui se retrouve insérée dans son instrument tel un Tetsuo, la mangeuse de pastèque n'est plus qu'une tête volante, la contoise avance et recule dans le temps, un chat démoniaque fait des siennes, l'héroïne est possédée et erre à travers les miroirs après s'être désintégrée dans un effet qui annonce Legend of Zu avec 25 ans d'avance, etc, etc. Avec sa musique toute aussi bizarre, ses innombrables effets constitués d'images découpées sur la pellicule tel un puzzle chaotique, et ses décors peints dignes d'Hansel et Grettel baignés d'une lumière blanche, mouate et diffuse, House démontre un festival d'inventivité dont le goût artistique se révèle aussi poussé et vertigineux que kitch et nauséeux.
Tout pourrait sembler typique d'un certain genre si cette ambiance légère et enfantine n'était pas solidement ancrée et constament contrebalancée par l'horreur et le surréalisme. Le mélange bien que poussé à l'extrême ne se veut pas évident et parvient ainsi à perdre le spectateur dans cet univers à part autant que ces jeunes ados se perdent dans les dédales de cette maison folle. Et même si au final, le scénario ne raconte pas grand chose d'intéressant, House se veut un ovni graphique à l'ambiance unique et réussit pleinement sa mission au point de s'afficher définitivement comme un film culte qui plaira ou non, mais qui a de fortes chances de laisser des images fortes gravées dans le cerveau du spectateur.
En bref, House est un peu au film pour enfants ce que Meet the feebles est aux films de Muppets avec une dilution accrue entre le genre qu'il aborde et le trash qu'il expose ce qui le rend plus subtile tout en restant très naïf. Avis aux amateurs de bizarreries filmiques niponnes.
House est un essai parfois flamboyant, d'un humour hermétique qui plaira aux plus geeks d'entre nous de par ses séquences surréalistes où un tableau, une tête décapitée ou une armoire vomissent du sang et par son accompagnement sonore oscillant entre ringardise totale (premier quart d'heure) et mélodies entêtantes aux accents vieillots qui lui scient tant. Mais si l'utilisation de la musique est parfois pénible car mal étagée sur la durée (du fait aussi de son omniprésence), elle ne fait que rappeler les belles heures du cinéma nippon enragé des seventies. Mais Obayashi n'oublie pas non plus sa petite liste de clins d'oeil amusants ou en hommage à un cinéma passé : lorsque la caméra filme le bout de la robe d'Oshare traînant par terre, laissant apparaître un cadre au sol, elle n'est pas sans rappeler le même plan chez Mizoguchi en toute fin de L'Impératrice Yang Kwei-Fei où la robe de l'impératrice découvre ses chaussures laissées par terre. Pensons aussi au personnage de Torajiro (Tora-san de Yamada Yoji) qui fait une courte apparition, parodié par un autre acteur mais d'une ressemblance physique et vocale frappante. Ce n'est certes pas grand chose, mais il fallait y penser et surtout réussir à incarner cette forme d'hommage dans un film qui ne laisse jamais la place à la cohérence ou à quelque chose de bien connu : la bataille de fin contre les "fantômes" est ainsi un grand moment de n'importe quoi, monté de manière épileptique mais mieux maîtrisé que dans celui de The Aimed School, carrément plus sentaï.