Cette histoire de flic blanc plongé en plein Chinatown pour tenter de faire respecter la loi dans un milieu culturel complètement différent m’a fait irrésistiblement pensé à L’Année du Dragon de Michael Cimino. Et même si ce dernier est de bien meilleure facture que Le Corrupteur (Mickey Rourke a quand même un peu plus de style et de présence que Mark Wahlberg, malgré le talent évident de l’ex-chanteur des New Kids on the Block), le film de James Foley (un réalisateur qui n’a pas signé que des chefs-d’œuvre…) vaut pourtant vraiment le détour. Ce n’est pas un film d’action basique comme tant d’autres, mais plutôt un bon vieux polar, efficace et nerveux, avec un bon vieux duel de personnalité entre 2 personnages au centre de l’intrigue.
Il faut dire que la ville, New York City, le quartier, Chinatown, et l’acteur principal, Chow Yun-Fat, sont des éléments importants de la bonne appréciation du film. Les 2 premiers installent l’action et la tension dans un endroit tout à fait propice à ce genre d’histoires, le troisième est étonnement expressif et crédible, chose dont on n’avait plus eu l’habitude depuis quelques temps, et arrive ainsi à imposer son charisme. En face, Mark Wahlberg oppose un contrepoids à l’hégémonie chinoise dans le film tout à fait satisfaisant.
En clair, Le Corrupteur est un bon film ; il comporte suffisamment de rebondissements, de face-à-face et de scènes d’action (très oubliables c’est vrai) pour garder l’attention du spectateur intacte.Agréable surprise que ce Corrupteur (même si on se demande pourquoi ils ont jugé nécessaire de traduire le titre pour la France). L'histoire est celle de l'engrenage de la corruption, par besoin, par envie, par devoir. Les personnages sont tour à tour corrompus et corrupteurs, bons et mauvais. C'est un film comme on les aime, avec des dialogues pour l'esprit, et des scènes d'action pour l'oeil.
Le point de départ est l'application de la loi dans le Chinatown de New-York. On est face à un gang de petits nouveaux, des êtres qui n'hésitent pas à tuer, contrairement aux anciens qui ont dépassés le stade peu lucratif du racket des commerçants, pour passer à celui de passeur d'immigrés et tenancier de maisons de joie. Les premiers sont des assassins, que l'agent Chen (Chow Yun Fat) se permet de bloquer au mépris du règlement, les seconds ne sont pas nuisibles au premier abord, mais ils enfreignent la loi.
Ceci se déroule dans la complaisance jusqu'à l'arrivée dans la petite équipe asiatique dirigée par Chen de l'agent Wallace (Mark Walhberg), un non asiatique, un type qui ne fera pas long feu dans cette unité aux yeux de Chen, un idéaliste en plus. Lui aussi tombera dans la corruption, pour des raisons différentes de celles de Chen. Ce n'est pas pour cela que l'un ou l'autre sont mauvais (le film n'est pas produit par Disney). La saveur de l'intrigue tient dans l'évolution des états des personnages face à cette réalité, et le sentiment de protection qu'a Chen vis-à-vis du nouveau venu. Le couple fonctionne très bien, comme celui que forment l'agent Wallace et son père.
A côté de ça, les scènes d'action sont loin d'être déplaisantes, même s'ils rechargent leurs pistolets. En tout cas, le film se termine mal, et ça c'est bien.
Après avoir été un peu brisé dans les critiques des magazines, je dois dire que le film m'a agréablement surpris. Bien sûr, ce n'est pas un chef d'oeuvre, mais c'est un très bon polar, bien filmé, bien interprété, avec un scénario certes un peu compliqué, mais je préfère ça à une histoire à 1 euro 25 de collaboration entre le flic blanc et le flic asiatique qui ne peuvent pas se voir au début et qui finissent comme cul et chemise.
En bref, j'ai trouvé que le duo principal (Yun-Fat et Mark) était assez intéressant, surtout le personnage du flic blanc. Yun-Fat a un rôle un peu plus classique, mais qu'on ne lui avait pas tellement vu jouer. On pourrait penser à Tequila de A Toute Epreuve, puisque les deux personnages ont en commun des méthodes assez expéditives (voir première scène du film avec Yun-Fat). Mais là où Tequila était un flic intègre, Chen est plus gris que blanc. Le film joue en permanence sur des histoires de corruption, qui se répètent dans tous les sens. C'est un peu à qui trahira ou corrompra l'autre le premier.
La réalisation de James Foley est assez efficace, avec des choix d'angles de vue assez sympathiques parfois. Les nombreuses scènes d'action sont plutôt bien filmés, même si Foley ne possède pas la vista de John Woo. La poursuite en voiture est le morceau de bravoure du film à ce niveau. Grâce à une alternance de scènes d'action et de dialogues, le film reste assez vivant à regarder, alors que les histoires de corruption et autres alliances avaient de quoi le rendre rébarbatif.
Terminons par la musique, assez sympathique dans le style mix asiatique/tubes du moment, et par la touche de mode de Yun-Fat . Il est habillé toujours aussi classe, costard cravate ou long manteau de cuir. Il arbore le traditionnel pansement sur le visage une fois dans le film, et fume des cigarettes. Par contre, je ne me rappelle pas lui avoir vu de lunettes de soleil. Enfin, oh joie pour les fans, ils utilisent des automatiques, et même deux à la fois dans une scène de fusillade au ralenti. Agréable aussi voir quelques ébauches des thèmes chers à John Woo, avec ici la relation entre Wallace et Chen qui voyage entre amitié et trahison.