une troisième partie inégale mais au-dessus de la mélée
Cette troisième partie accentue l'effet mosaique du film qui est un effet littéraire ayant du mal à passer dans le format cinématographique. Chaque personnage est dans un film différent (comique pour les mercenaires, tendu pour le poursuivant de Ryonosuke, baroque et délirant pour Rynosuke) mais ces films ne font jamais véritablement un ce qui fait qu'on aboutit à ce que les scènes prises séparément sont plus fortes que le film dans son ensemble (cela fonctionne mieux dans Le Détroit de la faim car la digression a un lien fort avec le reste du film). Néanmoins, la mise en scène et la photographie restent de très haut niveau (la réalisation est un poil trop classique mais administre des scènes au souffle barbare réhaussées par une photo aux chromas vifs sur la fin), les duels au sabre sont toujours soufflants, le film offre de beaux moments comiques -le samourai terrorisé par un chien- et porte la marque des thèmes d'Uchida: Rynosuke rencontre une femme errante défigurée que les hommes ne veulent épouser que pour son argent qui fait écho au héros de Meurtre à Yoshiwara. Surtout, dans la dernière demi-heure, le film va se resserrer autour du délire paranoiaque de Rynosuke, le ballader dans des cauchemars où il va revoir le fantome de celles qu'il a tuées, montrer la lutte psychologique entre Rynosuke et son poursuivant, le manque vis à vis de son fils ressenti par Rynosuke. Le retour du passé sera le chemin de Rynosuke qui va revenir...vers la tombe de sa femme défunte. Mais surtout, à l'instar du Détroit de la faim, le film s'achèvera par une mort aquatique comme si les personnages apatrides d'Uchida étaient condamnés à ne plus avoir de trace de leur passage sur terre et étaient incapables d'offrir à leurs descendants un héritage digne de ce nom. Malgré ses imperfections, le film se situe dans le haut du panier des drames historiques japonais et cette saga est à conseiller à tout ceux qui veulent découvrir un récit phare du patrimoine culturel japonais sans avoir à en lire la volumineuse version livresque originale.