Deux histoires courtes très poignantes
Le cheminot est l'adaptation d'un livre qui a également été mis en images dans un film du nom de Poppoya. N'ayant ni vu l'un ni lu l'autre, je ne ferais pas de grandes comparaisons. J'ai donc débarqué dans ce monde enneigé sans rien en savoir. Et il fait bien froid à l'extérieur de la maison du cheminot. Tout comme il a mené sa vie d'ailleurs, avec la plus grande froideur vis-à-vis de sa famille, bien que ce soit par conscience professionnelle. Un peu de chaleur va pourtant venir le trouver en ce soir de nouvel an sous la forme de différentes visites. En particulier, la venue de 2 jeunes filles va le faire replonger dans ses souvenirs et il va enfin parler de sa vie et de tous ses regrets. C'est une belle vie de cheminot qu'il a eu, il est d'ailleurs une référence pour beaucoup de ses collègues. Et maintenant que la retraite est arrivée, il doit faire le point sur sa vie d'homme. Tout est silencieux dehors et on a une sensation de sérénité mais aussi de solitude qui monte et qui atteint son apogée dans les dernières pages. Le dessin est très beau et le cheminot est doté d'une grande prestance qui reflètent bien son métier et la notoriété qu'il a gagnée en l'exerçant. L’homme se réveille maintenant et laisse apparaître des sourires sur son visage. Ceux qu’il n’avait pas donnés à sa famille. C’est triste et beau en même temps.
Le début de Love letter m'a moins séduite mais au fur et à mesure que l'histoire avance, on finit par être sensible aux changements qui s'opèrent chez ce voyou pas si méchant. L’amour qu’a développé cette femme pour lui alors que lui ignorait quasiment son existence est touchant et finalement, la fin n'en est pas moins triste et le dessin toujours aussi beau.
Deux nouvelles courtes mais intenses.
S'il est une chose que je déplorais il y a encore quelques temps, c'est la relative faiblesse de l'actualité manga "émotif, réflexion", au profit d'autres plus commerciaux et divertissants tels que GTO, Fruits Baskets, Love Hina, etc. J'ai donc quelque peu perdu goût aux mangas actuels, préférant me tourner vers Nausicäa, Akira, et d'autres d'il y a quelques années. Mais alors que je me promenais dans les rayons mangas d'un magasin, je suis tombé nez à nez avec un manga à l'allure étrange, à la couverture froide mais chaleureuse, j'ai nommé Le Cheminot. Et je n'en suis toujours pas revenu. Me voilà donc réconscillié avec le manga actuel.
Ce manga n'est pas comme les autres, sur plusieurs points. Tout d'abord, il y a deux histoires à l'intérieur du livre, et ensuite, tout est de haute qualité. La couverture est magnifique, nous avons le droit à 15 pages couleurs, et le papier ainsi que la trame sont d'excellente qualité. Merci donc Génération Comics pour cette magnifique édition.
LE CHEMINOT
Commençons donc par la première histoire: Le Cheminot. Adaptation du récit de Jiro Asada, récompensé en 1997 par le prix Noaki, le manga vous conte la fin de carrière d'un cheminot ( d'où le titre). Un cheminot qui a vu sa fille mourir à deux mois, et sa femme deux ans avant le début de l'histoire. Mais il n'aura jamais versé une seule larme, car "un cheminot ne doit jamais pleurer pour des histoires de famille". Travaillant dans une gare condamnée à être fermée par manque de fréquentation, située dans un endroit enneigé à l'écart du reste du monde, Otomatsu est toujours fidèle au poste, accueillant les trains comme le faisaient les cheminots d'il y a 50 ans. Tout se passe normalement, sa carrière touche à sa fin, lorsqu'il rencontre une mystérieuse jeune fille en plein milieu de la nuit, qui vient récupérer la poupée de sa sœur.
Excusez le maladroit résumé de l'histoire, mais celle ci se révèle impossible raconter. Je sais que cela peut paraître étrange, mais il n'y a pas de réelle intrigue dans Le cheminot. Vous assistez simplement à l'appréhension d'un homme qui, toute sa vie et au mépris de tout, aura travaillé et aura toujours donné le meilleur de lui même, forçant ainsi le respect de ses collègues qui auront préféré le confort d'un travail dans un centre commercial plutôt qu'au froid et à la pesante solitude d'une gare déserte.
Le contexte isolé de l'endroit renforce l'ambiance très froide et impersonnelle avec de la neige à perte de vue, et la fameuse gare où jamais personne ne passe. Et je finirai sur cette première histoire en disant, que, malgré que passé au second plan, le dessin et le trait du dessinateur sont absolument parfaits, affermissant encore un peu plus le sentiment de respect pour le chef de gare que l'on éprouve à la lecture de ce manga.
LOVE LETTERS
On n'est toujours pas remis de la dure vie du cheminot que l'on est projeté dans un univers complètement différent, celui d'un petit truand qui sort de prison pour avoir vendu des cassettes porno. C'est ainsi que commence la deuxième histoire, décevante au départ, mais tout aussi intéressante que Le Cheminot, au final.
Goro, petit voyou, apprend que sa femme est morte, pendant qu'il était en prison. Femme qui est en fait venue de chine pour se retrouver prostituée sur les trottoirs, et avec qui il a fait un mariage blanc pour lui permettre d'être en règle.
Goro doit donc remplir quelques papiers administratifs, et assister à l'enterrement. Ce n'est pour lui qu'une formalité, mais alors que ce dernier prend le train pour se rendre audit enterrement, il ouvre le dossier sur la jeune femme que lui a confié son 'employeur' ( car il ne la connaît pas, ainsi, pour ne pas éveiller les soupçons, il doit lire des fiches qui lui résument la vie de son 'épouse').
Et là, il découvre une lettre à son intention que sa femme lui a rédigé avant de mourir. Plus rien n'est désormais pareil à ses yeux, il se rend compte qu'en plus d'une bonne affaire financière, cette jeune femme était aussi un être humain, qui est morte par sa faute.
Véritable chef d’œuvre tant au niveau scénaristique qu'au niveau graphique, Love letters se hisse au niveau des plus grands mangas du genre, et aux yeux de certains, au dessus du Cheminot.
En résumé je dirai que Le Cheminot est une oeuvre absolument indispensable, d’une part car l'édition est absolument magnifique et les d’autre part car deux nouvelles sont bouleversantes. Mais attention, comme vous vous en doutez certainement, les amateurs de baston ( DBZ, Saint Seya) et autres n'apprécieront pas forcement. En vente en FNAC et autre. Environ 12,04 € ( 80 francs).
Si je ne mets que 4.5, c'est pour mieux mettre 5 à un autre manga... mais il l'aurait mérité.